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Anguttara Nikaya III.65

Kalama Sutta

Sermon aux Kalamas

Pour distribution gratuite exclusivement.


Note: Même si on cite souvent ce discours comme étant la "carte blanche" du Bouddha pour que chacun suive son propre sens du bien et du mal, il s'agit en fait de quelque chose de bien plus rigoureux. On ne doit pas suivre les traditions juste parce que ce sont des traditions. Les rapports (comme les nouvelles ou les compte-rendus historiques) n'ont pas à être suivi seulement parce que la source a l'air fiable. On n'a pas à suivre ses propres préférences simplement parce qu'elles ont l'air logiques et qu'elles entrent en résonnance avec ses propres sentiments. Au contraire, toute vue ou croyance doit être testée au moyen des résultats qu'elle donne lorsqu'on la met en pratique; et -- pour éviter la possibilité d'un parti-pris ou de limitations dans notre compréhension de ces résultats -- on doit encore les vérifier à l'aune de l'expérience des gens qui sont sages. La capacité à remettre en question et à vérifier ses propres croyances de façon appropriée s'appelle l'attention correcte. La capacité à reconnaître et à choisir des gens sages pour mentors s'appelle avoir des amis admirables. Selon Iti 16-17, ce sont, respectivement, les facteurs internes et externes les plus importants pour atteindre l'objectif de la pratique. Pour plus de réflexions sur la façon de tester une croyance dans la pratique, voir MN 61, MN 95, AN VII.80, et AN VIII.53. Pour des réflexions sur comment juger si une autre personne est sage, voir MN 110, AN IV.192, et AN VIII.54.
Les Kalamas de Kesaputta vont voir le Bouddha

1. Ainsi l'ai-je entendu. Un jour le Bienheureux, alors qu'il passait par le pays de Kosala en compagnie d'une grande communauté de bhikkhus, entra dans une ville des Kalamas appelée Kesaputta. Les Kalamas qui étaient les habitants de Kesaputta se dirent: "Le Révérend Gautama, le moine, le fils des Shakyan, , alors qu'il errait par le pays de Kosala, est entré dans Kesaputta. La bonne réputation du Révérend Gautama s'est répandue jusqu'ici: c'est vrai, le Béni du Ciel est ainsi accompli, pleinement éveillé, doté de la connaissance et de la pratique, sublime, connaisseur des mondes, sans pair, guide pour les hommes domptables, enseignant des êtres divins et humains, de ce qu'il a par lui-même compris clairement par connaissance directe. Il a lancé le Dharma, bon au début, bon au milieu, bon à la fin, doté du sens et de la lettre, et complet en tout; et il proclame la vie sainte qui est parfaitement pure. Voir des gens aussi accomplis est bon, en effet."

2. Or donc, les Kalamas qui habitaient Kesaputta s'en allèrent là où se trouvait le Bienheureux. En arrivant là, certains lui rendirent hommage et s'assirent de côté; d'autres échangèrent des salutations avec lui et à la fin d'une discussion cordiale et mémorable, s'assirent de côté; certains le saluèrent en levant leur paumes jointes et s'assirent de côté; certains annoncèrent leur nom et leur famille et s'assirent de côté; certains, sans rien dire, s'assirent de côté.

Les Kalamas de Kesaputta demandent conseil au Bouddha

3. Les Kalamas qui habitaient Kesaputta assis de côté dirent au Bienheureux: "Il y a des renonçants et des brahmanes, vénérable monsieur, qui visitent Kesaputta. Ils n'exposent et n'expliquent que leurs propres doctrines; celles des autres, ils les méprisent, les ridiculisent et les mettent en pièces. D'autres renonçants et brahmanes également, vénérable monsieur, viennent à Kesaputta. Eux aussi n'exposent et n'expliquent que leurs propres doctrines; celles des autres, ils les méprisent, les ridiculisent et les mettent en pièces. Vénérable monsieur, il nous prend des doutes et des incertitudes à leur sujet. Lesquels de ces révérends renonçants et brahmanes disent le vrai et lesquels disent le faux?

Le critère de rejet

4. -- Il est normal pour vous, ô Kalamas, de douter et d'être incertains; l'incertitude s'est levée en vous à propos de ce qui est douteux. Allez, Kalamas. Ne vous fiez pas à ce qui a été acquis du fait de l'avoir entendu de façon répétée; ni du fait de la tradition; ni du fait de la rumeur; ni du fait que ça se trouve dans une écriture; ni du fait d'une supposition; ni du fait d'un axiome; ni du fait d'un raisonnement spécieux; ni d'un parti-pris en faveur d'une notion à laquelle on a pu réfléchir; ni du fait de l'apparente habileté de quelqu'un d'autre; ni du fait de la considération 'Le moine est notre maître'. O Kalamas, lorsque vous savez de vous-mêmes: 'Ces choses sont mauvaises; ces choses sont blâmables; ces choses sont condamnées par les sages; si on les entreprend et si on les observe, ces choses conduisent au dommage et au malheur,' abandonnez-les.

Avidité, haine, et illusion

5. "Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Est-ce que l'avidité apparaît chez quelqu'un pour son bénéfice ou pour son malheur?
-- Pour son malheur, vénérable monsieur.
-- O Kalamas, en s'adonnant à l'avidité, et se trouvant mentalement débordé et vaincu par l'avidité, cette personne prendra la vie d'autrui, volera, commettra l'adultère et racontera des mensonges; elle poussera également les autres à en faire autant. Lui faudra-t-il longtemps pour qu'il en résulte son dommage et son malheur?
-- Non, vénérable monsieur.

6. -- Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Est-ce que la haine apparaît chez quelqu'un pour son bénéfice ou pour son malheur?
-- Pour son malheur, vénérable monsieur.
-- O Kalamas, en s'adonnant à la haine, et se trouvant mentalement débordé et vaincu par la haine, cette personne prendra la vie d'autrui, volera, commettra l'adultère et racontera des mensonges; elle poussera également les autres à en faire autant. Lui faudra-t-il longtemps pour qu'il en résulte son dommage et son malheur?
-- Non, vénérable monsieur.

7. -- Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Est-ce que l'illusion apparaît chez quelqu'un pour son bénéfice ou pour son malheur?
-- Pour son malheur, vénérable monsieur.
-- O Kalamas, en s'adonnant à l'illusion, et se trouvant mentalement débordé et vaincu par l'illusion, cette personne prendra la vie d'autrui, volera, commettra l'adultère et racontera des mensonges; elle poussera également les autres à en faire autant. Lui faudra-t-il longtemps pour qu'il en résulte son dommage et son malheur?
-- Non, vénérable monsieur.

8. -- Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Est-ce que ces choses sont bonnes ou mauvaises?
-- Mauvaises, vénérable monsieur.
-- Blâmables ou non blâmables?
-- Blâmables, vénérable monsieur.
-- Condamnées ou louées par les sages?
-- Condamnées, vénérable monsieur.
-- Si on les entreprend et si on les observe, ces choses conduisent-elles au dommage et au malheur? Que vous en semble-t-il?
-- Si on les entreprend et si on les observe, ces choses conduisent au dommage et au malheur. C'est là ce qu'il nous en semble.

9. -- C'est pour ces raisons, ô Kalamas, que nous avons dit ainsi, 'Allez, Kalamas. Ne vous fiez pas à ce qui a été acquis du fait de l'avoir entendu de façon répétée; ni du fait de la tradition; ni du fait de la rumeur; ni du fait que ça se trouve dans une écriture; ni du fait d'une supposition; ni du fait d'un axiome; ni du fait d'un raisonnement spécieux; ni d'un parti-pris en faveur d'une notion à laquelle on a pu réfléchir; ni du fait de l'apparente habileté de quelqu'un d'autre; ni du fait de la considération 'Le moine est notre maître'. O Kalamas, lorsque vous savez de vous-mêmes: 'Ces choses sont mauvaises; ces choses sont blâmables; ces choses sont condamnées par les sages; si on les entreprend et si on les observe, ces choses conduisent au dommage et au malheur,' abandonnez-les.

Le critère d'acceptation

10. "Allez, Kalamas. Ne vous fiez pas à ce qui a été acquis du fait de l'avoir entendu de façon répétée; ni du fait de la tradition; ni du fait de la rumeur; ni du fait que ça se trouve dans une écriture; ni du fait d'une supposition; ni du fait d'un axiome; ni du fait d'un raisonnement spécieux; ni d'un parti-pris en faveur d'une notion à laquelle on a pu réfléchir; ni du fait de l'apparente habileté de quelqu'un d'autre; ni du fait de la considération 'Le moine est notre maître'. O Kalamas, lorsque vous savez de vous-mêmes: 'Ces choses sont bonnes; ces choses ne sont pas blâmables; ces choses sont louées par les sages; si on les entreprend et si on les observe, ces choses conduisent au bénéfice et au bonheur,' entreprenez-les et observez-les.

Absence d'avidité, de haine, et d'illusion

11. "Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Est-ce que l'absence d'avidité apparaît chez quelqu'un pour son bénéfice ou pour son malheur?
-- Pour son bénéfice, vénérable monsieur.
-- O Kalamas, en ne s'adonnant pas à l'avidité, et n'étant pas mentalement débordé et vaincu par l'avidité, cette personne ne prendra pas la vie d'autrui, ne volera pas, ne commettra pas l'adultère et ne racontera pas de mensonges; elle poussera également les autres à en faire autant. Lui faudra-t-il longtemps pour qu'il en résulte son bénéfice et son bonheur?
-- Non, vénérable monsieur.

12. -- Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Est-ce que l'absence de haine apparaît chez quelqu'un pour son bénéfice ou pour son malheur?
-- Pour son bénéfice, vénérable monsieur.
-- O Kalamas, en ne s'adonnant pas à la haine, et n'étant pas mentalement débordé et vaincu par la haine, cette personne ne prendra pas la vie d'autrui, ne volera pas, ne commettra pas l'adultère et ne racontera pas de mensonges; elle poussera également les autres à en faire autant. Lui faudra-t-il longtemps pour qu'il en résulte son bénéfice et son bonheur?
-- Non, vénérable monsieur.

13. -- Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Est-ce que l'absence d'illusion apparaît chez quelqu'un pour son bénéfice ou pour son malheur?
-- Pour son bénéfice, vénérable monsieur.
-- O Kalamas, en ne s'adonnant pas à l'illusion, et n'étant pas mentalement débordé et vaincu par l'illusion, cette personne ne prendra pas la vie d'autrui, ne volera pas, ne commettra pas l'adultère et ne racontera pas de mensonges; elle poussera également les autres à en faire autant. Lui faudra-t-il longtemps pour qu'il en résulte son bénéfice et son bonheur?
-- Non, vénérable monsieur.

14. -- Qu'en pensez-vous, ô Kalamas ? Est-ce que ces choses sont bonnes ou mauvaises?
-- Bonnes, vénérable monsieur.
-- Blâmables ou non blâmables?
-- Pas blâmables, vénérable monsieur.
-- Condamnées ou louées par les sages?
-- Louées, vénérable monsieur.
-- Si on les entreprend et si on les observe, ces choses conduisent-elles au dommage et au malheur ou non? Que vous en semble-t-il?
-- Si on les entreprend et si on les observe, ces choses conduisent au bénéfice et au bonheur. C'est là ce qu'il nous en semble.

15. -- C'est pour ces raisons, ô Kalamas, que nous avons dit ainsi, 'Allez, Kalamas. Ne vous fiez pas à ce qui a été acquis du fait de l'avoir entendu de façon répétée; ni du fait de la tradition; ni du fait de la rumeur; ni du fait que ça se trouve dans une écriture; ni du fait d'une supposition; ni du fait d'un axiome; ni du fait d'un raisonnement spécieux; ni d'un parti-pris en faveur d'une notion à laquelle on a pu réfléchir; ni du fait de l'apparente habileté de quelqu'un d'autre; ni du fait de la considération 'Le moine est notre maître'. O Kalamas, lorsque vous savez de vous-mêmes: 'Ces choses sont mauvaises; ces choses sont blâmables; ces choses sont condamnées par les sages; si on les entreprend et si on les observe, ces choses conduisent au dommage et au malheur,' abandonnez-les.

Les Quatre Demeures exaltées

16. "Le disciple des Nobles Personnes, ô Kalamas, qui est de la sorte dépourvu de convoitise, dépourvu de mauvaise volonté, désillusionné, qui comprend clairement et attentif, demeure, grâce à sa pénétration, dans la pensée de l'amitié, pour un quart; de même pour le second quart; de même pour le troisième; et de même pour le quatrième; et de même au dessus, en dessous et en travers; il demeure, grâce à sa pénétration, à cause de l'existence en elle de tous les êtres vivants, partout, le monde entier, avec la grande pensée, exaltée et sans limite, de l'amitié qui est libre de haine ou de méchanceté.

"Il vit, grâce à sa pénétration, dans la pensée de la joie, pour un quart; de même pour le second quart; de même pour le troisième; et de même pour le quatrième; et de même au dessus, en dessous et en travers; il demeure, grâce à sa pénétration, à cause de l'existence en elle de tous les êtres vivants, partout, le monde entier, avec la grande pensée, exaltée et sans limite, de la joie qui est libre de haine ou de méchanceté.

"Il vit, grâce à sa pénétration, dans la pensée de la compassion, pour un quart; de même pour le second quart; de même pour le troisième; et de même pour le quatrième; et de même au dessus, en dessous et en travers; il demeure, grâce à sa pénétration, à cause de l'existence en elle de tous les êtres vivants, partout, le monde entier, avec la grande pensée, exaltée et sans limite, de la compassion qui est libre de haine ou de méchanceté.

"Il vit, grâce à sa pénétration, dans la pensée de l'équanimité, pour un quart; de même pour le second quart; de même pour le troisième; et de même pour le quatrième; et de même au dessus, en dessous et en travers; il demeure, grâce à sa pénétration, à cause de l'existence en elle de tous les êtres vivants, partout, le monde entier, avec la grande pensée, exaltée et sans limite, de l'équanimité qui est libre de haine ou de méchanceté.

Les Quatre Consolations

17. "Le disciple des Nobles Personnes, ô Kalamas, qui est de la sorte pourvu d'un esprit libre de haine, un tel esprit libre de méchanceté, un tel esprit libre de souillure, et un tel esprit purifié, en est un par qui les quatre consolations peuvent être trouvées ici et maintenant.

"'Supposons qu'il y ait un au-delà et qu'il y ait un fruit, résultat, des actions faites, bonnes ou mauvaises. Alors, il est possible qu'à la dissolution du corps après la mort, je monterai au monde céleste, qui est caractérisé par un état de bonheur.' C'est là la première consolation qu'il trouve.

"'Supposons qu'il n'y ait aucun au-delà et qu'il n'y ait aucun fruit, résultat, des actions faites, bonnes ou mauvaises. Pourtant, en ce monde, ici et maintenant, libre de haine, libre de méchanceté, sain et sauf, et heureux, je me maintiens.' C'est là la seconde consolation qu'il trouve.

"'Supposons que le mal échoie en partage à celui qui fait le mal. Moi, cependant, je m'efforce de ne causer aucun mal à personne. Alors, comment le mauvais (fruit) me toucherait-il qui ne commets aucun acte mauvais?' C'est là la troisième consolation qu'il trouve.

"'Supposons que le mauvais (fruit) n'échoie pas à celui qui fait le mal. Alors, je me verrai purifié dans tous les cas.' C'est là la quatrième consolation qu'il trouve.

"Le disciple des Nobles Personnes, ô Kalamas, qui a un tel esprit libre de haine, un tel esprit libre de méchanceté, un tel esprit libre de souillure, et un tel esprit purifié, en est un par qui ces quatre consolations peuvent être trouvées, ici et maintenant.

-- C'est ainsi, ô Béni du Ciel. C'est ainsi, ô Sublime. Le disciple des Nobles Personnes, vénérable monsieur, qui est de la sorte pourvu d'un esprit libre de haine, un tel esprit libre de méchanceté, un tel esprit libre de souillure, et un tel esprit purifié, en est un par qui trouve, ici et maintenant, quatre consolations.

"'Supposons qu'il y ait un au-delà et qu'il y ait un fruit, résultat, des actions faites, bonnes ou mauvaises. Alors, il est possible qu'à la dissolution du corps après la mort, je monterai au monde céleste, qui est caractérisé par un état de bonheur.' C'est là la première consolation qu'il trouve.

"'Supposons qu'il n'y ait aucun au-delà et qu'il n'y ait aucun fruit, résultat, des actions faites, bonnes ou mauvaises. Pourtant, en ce monde, ici et maintenant, libre de haine, libre de méchanceté, sain et sauf, et heureux, je me maintiens.' C'est là la seconde consolation qu'il trouve.

"'Supposons que le mal échoie en partage à celui qui fait le mal. Moi, cependant, je m'efforce de ne causer aucun mal à personne. Alors, comment le mauvais (fruit) me toucherait-il qui ne commets aucun acte mauvais?' C'est là la troisième consolation qu'il trouve.

"'Supposons que le mauvais (fruit) n'échoie pas à celui qui fait le mal. Alors, je me verrai purifié dans tous les cas.' C'est là la quatrième consolation qu'il trouve.

"Le disciple des Nobles Personnes, vénérable monsieur, qui a un tel esprit libre de haine, un tel esprit libre de méchanceté, un tel esprit libre de souillure, et un tel esprit purifié, en est un qui trouve, ici et maintenant, ces quatre consolations.

"Merveilleux, vénérable monsieur! Merveilleux, vénérable monsieur! C'est comme si, vénérable monsieur, quelqu'un retournait face par dessus ce qui est renversé, ou découvrait ce qui est caché, ou montrerait le chemin à quelqu'un qui est perdu ou porterait une lampe dans l'obscurité, pensant: 'Ceux qui ont des yeux verront les objets visibles', de sorte que le Dharma a été mis en branle de plusieurs manières par le Béni du Ciel. Nous, vénérable monsieur, allons au Béni du Ciel prendre refuge, et au Dharma pour prendre refuge, et à la communauté des Bhikkhus pour prendre refuge. Vénérable monsieur, que le Béni du Ciel nous considère comme des disciples laïcs qui ont pris refuge pour la vie, à partir de ce jour."



Version anglaise d'origine:
http://www.accesstoinsight.org/canon/anguttara/an03-065.html