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  Majjhima Nikaya 66

Latukikopama Sutta

La comparaison de la caille

D'après la traduction du Pâli à l'Anglais par Thanissaro Bhikkhu.
Pour libre distribution. Cet ouvrage peut être republié, reformaté, réimprimé et redistribué par n'importe quel média. L'auteur désire cependant que toute ces republications et redistributions soient mises à disposition du public librement et sans restriction aucune, et que les traductions et autres travaux dérivés soient clairement identifiés comme tels.


J'ai entendu qu'en une occasion le Béni du Ciel demeurait parmi les Anguttarapas dans un bourg Anguattarapan appelé Apana. Alors, tôt le matin, ayant mis ses robes et pris son manteau de dessus et son bol, il alla à Apana pour l'aumône. Ayant passé dans tout Apana pour l'aumône et revenant de sa tournée d'aumône, après son repas il alla dans un certain bosquet pour y passer la journée. S'enfonçant dans le bosquet, il s'assit pour passer la journée au pied d'un certain arbre.

Le vén. Udayîn, lui aussi, tôt le matin, ayant mis ses robes et pris son manteau de dessus et son bol, s'en alla à Apana pour l'aumône. Ayant passé dans tout Apana pour l'aumône et revenant de sa tournée d'aumône, après son repas il alla dans ce même bosquet pour y passer la journée. S'enfonçant dans le bosquet, il s'assit pour passer la journée au pied d'un certain arbre. Alors, comme il se trouvait seul en réclusion, ce train de pensées surgit dans sa conscience: "Il y a tant de choses pénibles que le Béni du Ciel a éloignées de nous! Il y a tant de choses agréables qu'il nous a apportées! Il y a tant de qualités malavisées que le Béni du Ciel a éloignées de nous! Il y a tant de qualités avisées qu'il nous a apportées!"

Alors, dans la soirée, le vén. Udayîn quitta la réclusion et alla voir le Béni du Ciel. En arrivant, s'étant incliné devant lui, il s'assit de côté. Une fois assis, il dit au Béni du Ciel: "A l'instant, seigneur, comme je me trouvais seul en réclusion, ce train de pensées surgit dans ma conscience: 'Il y a tant de choses pénibles que le Béni du Ciel a éloignées de nous! Il y a tant de choses agréables qu'il nous a apportées! Il y a tant de qualités malavisées que le Béni du Ciel a éloignées de nous! Il y a tant de qualités avisées qu'il nous a apportées!' Car dans le passé, seigneur, nous avions l'habitude de manger le matin, dans la soirée, et dans la journée au mauvais moment (l'après-midi). Alors il y eut une fois où le Béni du Ciel s'adressa aux moines, en disant, 'Moines, je vous prie de cesser de prendre un repas au mauvais moment de la journée.'[1] A l'époque j'en fus fâché, à l'époque j'en fus attristé, [me disant], 'Les exquises nourritures courantes et spéciales que de fidèles maîtres de maison nous donnent durant la journée au mauvais moment de la journée: même celles-là le Béni du Ciel nous les fait abandonner; même celles-là l'Ainsi-Venu nous les fait laisser!' Mais, par considération pour notre amour et respect envers le Béni du Ciel, par considération pour la honte et la crainte de mal faire, nous avons cessé de prendre un repas au mauvais moment de la journée.

"Nous mangions donc et dans la soirée et le matin. Alors il y eut une fois où le Béni du Ciel s'adressa aux moines, en disant, 'Moines, je vous prie de cesser de prendre ce repas du soir au mauvais moment de la journée.' A l'époque j'en fus fâché, à l'époque j'en fus attristé, [me disant], 'Le plus exquisément préparé de nos deux repas: même celui-là le Béni du Ciel nous le fait abandonner; même celui-là l'Ainsi-Venu nous le fait laisser! Il est arrivé, seigneur, qu'un homme -- s'étant procuré de bons ingrédients pour un curry durant la journée -- dise à son épouse, 'Met ceci de côté et nous le mangerons tous ensemble dans la soirée.' Toute bonne cuisine se fait dans la soirée, et pratiquement aucune au cours de la journée. Mais, par considération pour notre amour et respect envers le Béni du Ciel, par considération pour la honte et la crainte de mal faire, nous avons cessé de prendre ce repas du soir au mauvais moment de la journée.

"Il est arrivé, seigneur, que des moines se promenant en quête d'aumônes au plus sombre de la nuit aient mis pied dans un bassin d'eaux usées, soient tombés dans une fosse septique, se soient empêtrés dans un roncier, ou aient trébuché sur une vache endormie. Ils sont tombés sur de jeunes hooligans qui allaient ou revenaient de commettre un crime. Des femmes leur ont fait des propositions sexuelles. Une fois que j'étais parti en quête d'aumônes au plus sombre de la nuit, une femme qui était en train de laver des casseroles. A ces mots, je lui dis, 'Je ne suis pas un démon, ma soeur. Je suis un moine qui demande l'aumône.' 'En ce cas, tu es un moine dont le père est mort ainsi que sa mère. Il vaudrait mieux pour toi, moine, qu'on t'ouvre le ventre avec un couteau de boucher acéré plutôt que tu rôdes en quête d'aumônes pour le bien de ton ventre au plus sombre de la nuit!" En me rappelant cela, seigneur, la pensée m'est venue: 'Il y a tant de choses pénibles que le Béni du Ciel a éloignées de nous! Il y a tant de choses agréables qu'il nous a apportées! Il y a tant de qualités malavisées que le Béni du Ciel a éloignées de nous! Il y a tant de qualités avisées qu'il nous a apportées!'"

"De la même manière, Udayîn, il y a des hommes sans valeur qui, quand je leur dis, 'Abandonnez ceci,' disent: 'Pourquoi cette chose mesquine, élémentaire? C'est vraiment un pinailleur, ce contemplatif.' Ils ne l'abandonnent pas. Ils se montrent grossiers envers moi et envers les moines qui sont zélés à s'entraîner. Pour eux il s'agit là d'un piège puissant, un piège épais, un piège lourd, un piège imputrescible, et un joug épais.

"Supposons qu'une caille se faisait prendre au piège d'un lacet en liane pourrie, dont elle pourrait attendre d'être blessée, capturée, ou tuée, et que quelqu'un disait, 'Cette liane pourrie par laquelle cette caille est prise au piège, et dont elle pourrait attendre d'être blessée, capturée, ou tuée, est pour elle un piège faible, un piège minable, un piège pourri, un piège insubstanciel.' Est-ce que la personne parlant ainsi parlerait correctement?"

"Non, seigneur. Cette liane pourrie... est pour elle un piège puissant, un piège épais, un piège lourd, un piège imputrescible, et un joug épais.

"De même, Udayîn, il y a des hommes sans valeur qui, quand je leur dis, 'Abandonnez ceci,' disent: 'Pourquoi cette chose mesquine, élémentaire? C'est vraiment un pinailleur, ce contemplatif.' Ils ne l'abandonnent pas. Ils se montrent grossiers envers moi et envers les moines qui sont zélés à s'entraîner. Pour eux il s'agit là d'un piège puissant, un piège épais, un piège lourd, un piège imputrescible, et un joug épais.

"Or il y a des hommes de clan qui, quand je leur dis, 'Abandonnez ceci,' disent: 'Pourquoi le Béni du Ciel nous fait-il abandonner ceci? Pourquoi l'Ainsi-Venu nous fait-il laisser cette chose mesquine, élémentaire?' Mais ils l'abandonnent et ne sont pas grossiers envers moi ou envers les moines qui sont zélés à s'entraîner. L'ayant abandonné, ils vivent sans souci, sans se troubler, leurs besoins satisfaits, leur esprit semblable à un cerf sauvage. Pour eux il s'agit là d'un piège faible, un piège minable, un piège pourri, un piège insubstanciel.

"Supposons un éléphant royal -- immense, avec pedigree, habitué aux batailles, ses défenses semblables à des timons de char -- se faisait prendre au piège d'épais collets de cuir, mais qu'en se tordant le corps un peu il pouvait rompre et exploser ces collets et s'en aller où il voudrait. Et supposons que quelqu'un disait, 'Ces épais collets de cuir par lesquels l'éléphant royal... avait été pris au piège, mais que -- en se tordant le corps un peu -- il pouvait rompre et exploser et s'en aller où il voudrait: étaient pour lui un piège puissant, un piège épais, un piège lourd, un piège imputrescible, et un joug épais.' Est-ce que la personne parlant ainsi parlerait correctement?'

"Non, seigneur. Ces épais collets de cuir... étaient pour lui un piège faible, un piège minable, un piège pourri, un piège insubstanciel."

"De même, Udayîn, il y a des hommes de clan qui, quand je leur dis, 'Abandonnez ceci,' disent: 'Pourquoi le Béni du Ciel nous fait-il abandonner ceci? Pourquoi l'Ainsi-Venu nous fait-il laisser cette chose mesquine, élémentaire?' Mais ils l'abandonnent et ne sont pas grossiers envers moi ou envers les moines qui sont zélés à s'entraîner. L'ayant abandonné, ils vivent sans souci, sans se troubler, leurs besoins satisfaits, leur esprit semblable à un cerf sauvage. Pour eux il s'agit là d'un piège faible, un piège minable, un piège pourri, un piège insubstanciel.

"Supposons qu'il y avait un pauvre, désargenté et indigent, avec une simple petite cabane -- délabrée, ouverte aux corneilles (à tous les vents), pas vraiment ce qui se fait de mieux; et un seul lit -- délabré, pas vraiment ce qui se fait de mieux; et un seul pot de riz et de graines de courge -- pas vraiment ce qui se fait de mieux; et une seule épouse -- pas vraiment ce qui se fait de mieux. Il se rendrait dans un parc et verrait un moine -- les mains et les pieds lavés après un repas délicieux, assis à l'ombre fraîche, se consacrant à élever son esprit. Il lui viendrait à l'idée: 'Qu'il est heureux l'état contemplatif! Qu'il est libre de la maladie l'état contemplatif! Ah, si je pouvais -- me rasant les cheveux et la barbe et endossant la robe ocre -- quitter la vie domestique pour la vie sans domicile fixe!' Mais qu'étant incapable d'abandonner sa simple petite cabane -- délabrée, ouverte aux corneilles (à tous les vents), pas vraiment ce qui se fait de mieux; son seul lit -- délabré, pas vraiment ce qui se fait de mieux; son seul pot de riz et de graines de courge -- pas vraiment ce qui se fait de mieux; et sa seule épouse -- pas vraiment ce qui se fait de mieux -- il ne pouvait pas se raser les cheveux et la barbe, endosser la robe ocre, ou quitter la vie domestique pour la vie sans domicile fixe. Et supposons que quelqu'un disait, 'Cette simple petite cabane... ce seul lit... ce seul pot... et cette seule épouse -- pas vraiment ce qui se fait de mieux -- par laquelle cet homme avait été pris au piège, qu'il avait été incapable d'abandonner, et à cause de laquelle il n'avait pu se raser les cheveux et la barbe, endosser la robe ocre, et quitter la vie domestique pour la vie sans domicile fixe: étaient pour lui un piège faible, un piège minable, un piège pourri, un piège insubstanciel.' Est-ce que la personne parlant ainsi parlerait correctement?"

"Non, seigneur. Cette simple cabane... ce seul lit... ce seul pot... cette seule épouse... étaient pour cet homme un piège puissant, un piège épais, un piège lourd, un piège imputrescible, et un joug épais."

"De même, Udayîn, il y a des hommes sans valeur qui, quand je leur dis, 'Abandonnez ceci,' disent: 'Pourquoi cette chose mesquine, élémentaire? C'est vraiment un pinailleur, ce contemplatif.' Ils ne l'abandonnent pas. Ils se montrent grossiers envers moi et envers les moines qui sont zélés à s'entraîner. Pour eux il s'agit là d'un piège puissant, un piège épais, un piège lourd, un piège imputrescible, et un joug épais.

"Or supposons, Udayîn, qu'il y avait un maître de maison ou le fils d'un maître de maison -- riche, prospère, et opulent -- avec de vastes quantités de lingots d'or, de vastes quantités de grain, un grand nombre de champs, une grande quantité de terres, un grand nombre d'épouses, et un grand nombre de d'esclaves mâles et femelles. Il se rendrait dans un parc et verrait un moine -- les mains et les pieds lavés après un repas délicieux, assis à l'ombre fraîche, se consacrant à élever son esprit. Il lui viendrait à l'idée: 'Qu'il est heureux l'état contemplatif! Qu'il est libre de la maladie l'état contemplatif! Ah, si je pouvais -- me rasant les cheveux et la barbe et endossant la robe ocre -- quitter la vie domestique pour la vie sans domicile fixe!' Et qu'étant capable d'abandonner ses vastes quantités de lingots d'or, ses vastes quantités de grain, son grand nombre de champs, sa grande quantité de terres, son grand nombre d'épouses, et son grand nombre de d'esclaves mâles et femelles, il était en mesure de se raser les cheveux et la barbe, endosser la robe ocre, et de quitter la vie domestique pour la vie sans domicile fixe. Or supposons que quelqu'un disait, 'Ces vastes quantités de lingots d'or... et un grand nombre de d'esclaves mâles et femelles par lesquels ce maître de maison ou le fils de ce maître de maison avait été pris au piège mais qu'il a pu abandonner pour pouvoir se raser les cheveux et la barbe, endosser la robe ocre, et quitter la vie domestique pour la vie sans domicile fixe: étaient pour lui un piège puissant, un piège épais, un piège lourd, un piège imputrescible, et un joug épais.' Est-ce que la personne parlant ainsi parlerait correctement?"

"Non, seigneur. Ces vastes quantités de lingots d'or... étaient pour lui un piège faible, un piège minable, un piège pourri, un piège insubstanciel.'

"De même, Udayîn, il y a des hommes de clan qui, quand je leur dis, 'Abandonnez ceci,' disent: 'Pourquoi le Béni du Ciel nous fait-il abandonner ceci? Pourquoi l'Ainsi-Venu nous fait-il laisser cette chose mesquine, élémentaire ?' Mais ils l'abandonnent et ne sont pas grossiers envers moi ou envers les moines qui sont zélés à s'entraîner. L'ayant abandonné, ils vivent sans souci, sans se troubler, leurs besoins satisfaits, leur esprit semblable à un cerf sauvage. Pour eux il s'agit là d'un piège faible, un piège minable, un piège pourri, un piège insubstanciel.

"Udayîn, on peut trouver ces quatre types de gens dans le monde. Quels quatre? On a le cas où quelqu'un pratique en vue de l'abandon et de la mise de côté des acquisitions. Comme il pratique en vue de l'abandon et de la mise de côté des acquisitions, des souvenirs et des résolutions associées aux acquisitions l'assaillent. Il leur donne raison. Il ne les abandonne pas, ne les détruit pas, ne les dissipe pas, ni ne les fait disparaître de l'existence. Je te dis, Udayîn, que cette sorte de personne est enchaînée, qu'elle n'est pas détachée. Pourquoi cela? Parce que j'ai connu la diversité des facultés par rapport à ce type de personne.

"Puis on a le cas où quelqu'un qui pratique en vue de l'abandon et de la mise de côté des acquisitions. Comme il pratique en vue de l'abandon et de la mise de côté des acquisitions, des souvenirs et des résolutions associées aux acquisitions l'assaillent. Il ne leur donne pas raison. Il les abandonne, les détruit, les dissipe, et les fait disparaître de l'existence. Je te le dis, Udayîn, que cette sorte de personne est enchaînée, qu'elle n'est pas détachée. Pourquoi cela? Parce que j'ai connu la diversité des facultés par rapport à ce type de personne.

"Puis on a le cas où quelqu'un pratique en vue de l'abandon et de la mise de côté des acquisitions. Comme il pratique en vue de l'abandon et de la mise de côté des acquisitions, alors -- de temps en temps, à cause de défaillances dans l'attention -- il est assailli par des souvenirs et des résolutions associées aux acquisitions. Lente est la montée de son attention, mais alors il abandonne rapidement [ces souvenirs et ces résolutions], les détruit, les dissipe, et les fait disparaître de l'existence. C'est tout comme là où deux ou trois gouttes d'eau tombent sur une poêle en fer qui a chauffé toute la journée: Lente est la chute des gouttes d'eau, mais elles s'évaporent et disparaissent rapidement. De même, on a le cas où quelqu'un pratique en vue de l'abandon et de la mise de côté des acquisitions. Comme il pratique en vue de l'abandon et de la mise de côté des acquisitions, alors -- de temps en temps, à cause de défaillances dans l'attention -- il est assailli par des souvenirs et des résolutions associées aux acquisitions. Lente est la montée de son attention, mais alors il abandonne rapidement [ces souvenirs et des résolutions], les détruit, les dissipe, et les fait disparaître de l'existence. Je te le dis, Udayîn, que cette sorte de personne est enchaînée, qu'elle n'est pas détachée. Pourquoi cela? Parce que j'ai connu la diversité des facultés par rapport à ce type de personne.

"Puis on a le cas où quelqu'un, prenant conscience que les acquisitions sont la racine de la souffrance et du stress, est sans acquisitions, détaché dans la fin des acquisitions. Je te le dis, Udayîn, que cette sorte de personne est sans attaches, pas enchaînée. Pourquoi cela? Parce que j'ai connu la diversité des facultés par rapport à ce type de personne.

"On peut trouver ces quatre types de gens dans le monde.

"Et, Udayîn, il y a ces cinq éléments du désir. Quels cinq? Les formes connaissables par l'oeil -- agréables, plaisantes, charmantes, attachantes, entretenant le désir, aguichantes. Les sons connaissables par l'oreille... Les arômes connaissables par le nez... Les saveurs connaissables par la langue... Les sensations tactiles connaissables par le corps -- agréables, plaisantes, charmantes, attachantes, entretenant le désir, aguichantes. Ce sont là les cinq éléments du désir. Or, tout plaisir et tout bonheur qui surgit en fonction de ces cinq éléments du désir s'appelle plaisir des sens, plaisir immonde, plaisir vulgaire, plaisir ignoble. Et de ce plaisir je dis qu'il ne faut pas le cultiver, pas le développer, pas le poursuivre, qu'il faut le craindre.

"Or, on a le cas où un moine -- tout à fait retiré du désir, retiré des qualités mentales malavisées -- pénètre et demeure dans le premier jhâna: ravissement et plaisir nés de la retraite, accompagnés par la pensée dirigée et l'évaluation. Avec la pacification de la pensée dirigée et l'évaluation, il pénètre et demeure dans le second jhâna: ravissement et plaisir nés de concentration, unification de la conscience exempte de la pensée dirigée et l'évaluation -- assurance intérieure. Avec l'estompement du ravissement, il demeure dans l'équanimité, attentif et vigilant, et physiquement sensible au plaisir. Il pénètre et demeure dans le troisième jhâna, dont les Nobles Personnes déclarent, 'Equanime et attentif, il a une situation agréable.' Avec l'abandon de plaisir et la douleur -- tout comme dans le cas de la précédente disparition de l'euphorie et l'angoisse -- il pénètre et demeure dans le quatrième jhâna: pureté de l'équanimité et l'attention, ni plaisir ni la douleur. Ceci s'appelle plaisir du renoncement, plaisir de la réclusion, plaisir du calme, plaisir de l'éveil par soi-même. Et de ce plaisir je dis qu'il faut le cultiver, le développer, le poursuivre, qu'il ne faut pas le craindre.

"Or, on a le cas où un moine -- tout à fait retiré du désir, retiré des qualités mentales malavisées -- pénètre et demeure dans le premier jhâna: ravissement et plaisir nés de la retraite, accompagnés par la pensée dirigée et l'évaluation. Cela, je te le dis, entre dans la catégorie du perturbable. Et là, qu'est-ce qui entre dans la catégorie du perturbable? Les pensées dirigées et les évaluations qui n'avaient pas encore cessé: c'est là ce qui entre dans la catégorie du perturbable.

"On a le cas où un moine, avec la pacification de la pensée dirigée et de l'évaluation, pénètre et demeure dans le second jhâna: ravissement et plaisir nés de concentration, unification de la conscience exempte de la pensée dirigée et de l'évaluation -- assurance intérieure. Cela, je te le dis, entre dans la catégorie du perturbable. Et là, qu'est-ce qui entre dans la catégorie du perturbable ? Le plaisir du ravissement qui n'avait pas encore cessé: c'est là ce qui entre dans la catégorie du perturbable.

"On a le cas où un moine, avec l'estompement du ravissement, demeure dans l'équanimité, attentif et vigilant, et physiquement sensible au plaisir. Il pénètre et demeure dans le troisième jhâna, dont les Nobles Personnes déclarent, 'Equanime et attentif, il a une situation agréable.' Cela, je te le dis, entre dans la catégorie du perturbable. Et là, qu'est-ce qui entre dans la catégorie du perturbable ? Le plaisir d'équanimité qui n'avait pas encore cessé: c'est là ce qui entre dans la catégorie du perturbable.

"On a le cas où un moine, avec l'abandon du plaisir et de la douleur -- tout comme dans le cas de la précédente disparition de l'euphorie et de l'angoisse -- pénètre et demeure dans le quatrième jhâna: pureté de l'équanimité et de l'attention, ni plaisir ni douleur. Or cela, je te le dis, entre dans la catégorie de l'imperturbable.[2]

"Or on a le cas où un moine... pénètre et demeure dans le premier jhâna: ravissement et plaisir nés de la retraite, accompagnés par la pensée dirigée et l'évaluation. Cela, je te le dis, ne suffit pas. Abandonne-le, je te le dis. Transcende-le, je te le dis. Et quelle est sa transcendance?

"On a le cas où un moine... pénètre et demeure dans le second jhâna... C'est là sa transcendance. Mais cela non plus, je te le dis, ne suffit pas. Abandonne-le, je te le dis. Transcende-le, je te le dis. Et quelle est sa transcendance?

"On a le cas où un moine... pénètre et demeure dans le troisième jhâna... Telle est sa transcendance. Mais cela non plus, je te le dis, ne suffit pas. Abandonne-le, je te le dis. Transcende-le, je te le dis. Et quelle est sa transcendance?

"On a le cas où un moine...pénètre et demeure dans le quatrième jhâna... Telle est sa transcendance. Mais cela non plus, je te le dis, ne suffit pas. Abandonne-le, je te le dis. Transcende-le, je te le dis. Et quelle est sa transcendance?

"Puis on a le cas où un moine, avec la transcendance complète des perceptions de la forme [physique], avec la disparition des perceptions de résistance, et ne tenant pas compte des perceptions de la diversité, se disant, 'Espace infini,' pénètre et demeure dans la dimension de l'infinitude de l'espace. Telle est sa transcendance. Mais cela non plus, je te le dis, ne suffit pas. Abandonne-la, je te le dis. Transcende-la, je te le dis. Et quelle est sa transcendance?

"Puis on a le cas où un moine, avec la transcendance complète de la dimension de l'infinitude de l'espace, se disant, 'Conscience infinie,' pénètre et demeure dans la dimension de l'infinitude de la conscience. Telle est sa transcendance. Mais cela non plus, je te le dis, ne suffit pas. Abandonne-la, je te le dis. Transcende-la, je te le dis. Et quelle est sa transcendance?

"Puis on a le cas où un moine, avec la transcendance complète de la dimension de l'infinitude de la conscience, se disant, 'Il n'y a rien,' pénètre et demeure dans la dimension du néant. Telle est sa transcendance. Mais cela non plus, je te le dis, ne suffit pas. Abandonne-la, je te le dis. Transcende-la, je te le dis. Et quelle est sa transcendance?

"Puis on a le cas où un moine, avec la transcendance complète de la dimension du néant, pénètre et demeure dans la dimension de ni perception ni non-perception. Telle est sa transcendance. Mais cela non plus, je te le dis, ne suffit pas. Abandonne-la, je te le dis. Transcende-la, je te le dis. Et quelle est sa transcendance?

"On a le cas où un moine, avec la transcendance complète de la dimension de ni perception ni non-perception, pénètre et demeure dans la cessation de perception et sensation. Telle est sa transcendance.

"C'est ainsi, Udayîn, que je parle même de l'abandon de la dimension de ni perception ni non-perception. Vois-tu une quelconque entrave, grande ou petite, de l'abandon de laquelle je ne parle pas?"

"Non, seigneur."

Voilà ce que dit le Béni du Ciel. Gratifié, le vén. Udayîn se réjouit des paroles du Béni du Ciel.


Notes

1. Le compte-rendu du vén. Udayîn n'a ici aucun rapport avec l'histoire d'origine qu'on trouve dans Pacittiya 37, la règle qui interdit aux moines de manger au mauvais moment de la journée. Pour une raison quelconque, le Commentaire n'explique pas l'incohérence. Il se pourrait que les événements ici rapportés aient eu lieu avant l'incident qui est rapporté dans l'histoire originelle, qui a convaincu le Bouddha qu'il fallait formuler une règle d'entraînement pour traiter de cette sorte de comportement. Autrement dit, il aurait commencé par dire 'je vous en prie'; cela s'étant révélé inefficace, il aurait établi la règle. [Retour]

2. Voir la note à MN 106. [Retour]



Version anglaise d'origine:

http://accesstoinsight.org/canon/sutta/majjhima/mn066.html